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Entretien Hydrogène "vert" : «  L'objectif ? Éliminer 20 millions de tonnes de CO2 d’ici 2030 »

L'association France Hydrogène a fortement œuvré pour le déploiement de l'hydrogène renouvelable en France. Elle a été, si l'on peut dire, "récompensée" avec l'annonce de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France. Sept milliards d'investissement ont été promis d'ici 2030, après les 100 millions mis sur la table en 2018, par l'ancien ministre de l'Environnement. Pour accompagner cet élan, France Hydrogène vient de créer 12 délégations régionales, pour accompagner et accélérer le déploiement des projets. Entretien avec deux déléguées fraîchement nommées.
La rédaction du Direct éco - 22 févr. 2021 à 14:04 | mis à jour le 11 mars 2022 à 16:10 - Temps de lecture :
Elisabeth Logeais, déléguée régionale France Hydrogène Auvergne-Rhône-Alpes, dirige le pôle de compétitivité Tenerrdis.
Elisabeth Logeais, déléguée régionale France Hydrogène Auvergne-Rhône-Alpes, dirige le pôle de compétitivité Tenerrdis.
Elisabeth Logeais, déléguée régionale France Hydrogène Auvergne-Rhône-Alpes

Quels objectifs s’est fixés France Hydrogène ?

Au niveau national, France Hydrogène veut arriver à une production de 700 000 tonnes d’hydrogène décarboné à horizon 2030. Ce qui correspond à une capacité de production autour de 7 gigawatts. Ça veut dire qu’on a mis en œuvre les capacités de production pour ces 7 gigawatts. Mais ce qui est intéressant, c’est les émissions de CO2. L’objectif de France hydrogène, c’est qu’on ait éliminé 20 millions de tonnes d’émissions cumulées au cours de la décennie. Finalement l’objectif est là.

Quels métiers vont émerger ?

Il y a différentes typologies. En recherche et développement, c’est là où on a un écosystème dense, même s’il n’y a pas encore de filière hydrogène. On travaille d’ailleurs sur la création de formations et de modules hydrogène. Ce qui est en tension ce sont les métiers liés à la fabrication et encore plus en tension les métiers de l’installation et de l’exploitation. Nous sommes en train de réaliser une enquête afin de connaître les métiers dont les entreprises ont besoin. Mais beaucoup sont actuellement prêtes à former elles-mêmes. On réfléchit à voir comment l’automobile et l’aéronautique, filières en difficulté, peuvent se reconvertir pour servir des filières en croissance. Idem dans le pétrole où il y a déjà une connaissance du gaz.

Les entreprises veulent-elles rester en France ? On voit que McPhy produit en Italie et en Allemagne…

On sent que les entreprises dans ces domaines ont investi par conviction. Elles ont des valeurs, elles veulent produire en France et sont attachées à créer une filière en France. McPhy veut étendre ses capacités de production en France. Mais si on a besoin d’une filière française, on a aussi besoin d’une filière européenne. C’est ce qui nous permettra de rester compétitifs vis-à-vis des Chinois ou des Coréens qui ont démarré plus tôt et plus vite sur les véhicules hydrogène. Je crois que nous avons un avantage technologique pointu. On a une vraie French tech.

Pourquoi Grenoble est-elle en pointe sur l’hydrogène ?

D’abord, on a des acteurs comme Air liquide historiquement implantés. Mais c’est grâce à l’écosystème de recherche - CEA, Liten, Ines en Savoie - qu’on a pu voir arriver de nouvelles technologies comme l’électrolyse et des usages avec les piles à combustible. À un moment, on disait que 80 % de la filière hydrogène était dans le bassin grenoblois… Bon, en tirant vers la Drôme et la Savoie. Les deux premiers acteurs ont été McPhy sur l’électrolyseur et Symbio sur la pile à combustible. Dans le cadre du projet Hyway, une station de recharge a été installée sur le campus d’Air liquide à Sassenage ; à ma connaissance c’était la première de France.

Anne-Marie Perez est la directrice du pôle de compétitivité Capenergies à Aix-en-Provence. Elle a été choisie pour animer la délégation France Hydrogène en Région Sud.
Anne-Marie Perez est la directrice du pôle de compétitivité Capenergies à Aix-en-Provence. Elle a été choisie pour animer la délégation France Hydrogène en Région Sud.
Anne-Marie Perez, déléguée France Hydrogène en Région Sud

Quels sont les enjeux de votre mandat ?

«Il y a une stratégie d’accélération annoncée par l’État en septembre 2020 pour faire en sorte qu’une filière française se déploie et prenne sa place dans les industries en France et en Europe et que, ce faisant, le prix de l’hydrogène diminue pour contribuer à la lutte contre l’effet de serre en décarbonant l’industrie et certains transports. Pour faire cela, l’association France Hydrogène, très active, a considéré qu’il fallait […] créer des délégations régionales où les membres vont se retrouver pour travailler ensemble et faire en sorte que sur leur territoire, on puisse trouver des moyens pour accélérer et mutualiser un certain nombre d’actions. »

Combien de membres compte votre délégation ?

« France Hydrogène en Région Sud, c’est une trentaine de structures : des entreprises, des collectivités et une seule structure de recherche pour l’instant, l’université de Corse qui dispose d’une plateforme hydrogène conséquente.»

Votre territoire est-il déjà actif dans le domaine de l'hydrogène renouvelable ?

« Déjà une trentaine de projets existent. Les caractéristiques de la région, c’est qu’on a un fort potentiel d’usage notamment pour décarboner l’industrie et la logistique autour de l’écosystème portuaire de Fos-Marseille. L’autre caractéristique, c’est d’avoir une façade maritime. On a quelques projets en cours pour développer des bateaux et des navettes. Sur le Vaucluse, il y a un gros potentiel pour décarboner le transport logistique, puisque le Vaucluse est un corridor. Dans le transport lourd, l’hydrogène a une forte valeur ajoutée par report à électrique, car il est plus compact et léger et il permet une recharge rapide. »

Au niveau réglementaire, est-on prêt ?

« On ne sait pas si on va avoir des autorisations rapides dans les [Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement] pour implanter des sites. C’est toujours un peu long les autorisations administratives… Implanter un champ photovoltaïque prend du temps car il y a des tas d’études sur le plan de la biodiversité. On veut produire de l’hydrogène vert avec des énergies renouvelables, encore faut-il qu’on ait les autorisations pour produire les énergies en question. Dans les ports, on ne sait pas comment ce sujet va être pris en compte. En fait, et c’est ça qui est assez chouette, on est au début d’une aventure industrielle. Et l’objectif de l’État et de France Hydrogène, c’est de permettre à tous les acteurs de travailler ensemble pour aller plus vite. »

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